Persepolis à Téhéran, suite

Publié le par Silouane

Le 14 mai 2008, Persepolis de Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud a été à nouveau diffusé publiquement à Téhéran (pour voir le compte-rendu de la précédente projection, cliquez ici). La projection avait lieu à la Faculté de littérature de l’Université de Téhéran, elle était précédée de celle du cours métrage Fitna, brûlot islamophobe réalisé par le député hollandais d’extrême droite Geert Wilders. Le tout s’intitulait : « Projection critique de films anti-islamiques ».


La projection avait lieu dans le grand amphithéâtre Ferdowsi où les filles étaient invitées à s’asseoir à gauche et les garçons à droite. Le public avait, du point de vue de son style vestimentaire, l’allure religieuse. Comme souvent dans les cérémonies officielles, tout a commencé en retard par une lecture du Coran et la diffusion de l’hymne national.


Fitna
présentait pendant une quinzaine de minutes une alternance d’extraits du Coran et d’images d’attentats terroristes, accompagnée d’appel à lutter contre la présence des musulmans en Europe. La vulgarité et la bêtise de ce film, condamnées partout en Europe, a jeté un malaise dans l’assemblée. Les deux critiques officiels ont souligné le peu de cas qu’il y avait à faire de ce film de propagande sans suffisamment expliquer, à mon avis, la faible représentativité en Europe des thèses qu’il défend.


La projection de Persepolis a suivi. Etrangement, la censure était radicalement différente à celle opérée lors de la précédente diffusion publique. Presque toutes les scènes coupées il y trois mois étaient présentes, alors que d’autres avaient été ôtées. Le film n’était ni sous-titré ni doublé et un homme assurait au micro une traduction simultanée approximative des propos des personnages. Cette traduction en directe était une censure complexe : certains propos vulgaires et critiques n’étaient délibérément pas traduits, alors que d’autres critiques étaient soigneusement expliquées.


La salle a éclaté de rire et a applaudi lors de la scène où les étudiants d’art plastique dessinent d’après nature une femme en tchador. Ils ont également ri quand la mère de Marjane s’évanouit à l’aéroport après le départ de la fille, sans que je ne comprenne pourquoi.

Au cours de la projection, des glaces ont été distribuées gratuitement à l’ensemble du public (200-300 personnes).


La discussion a été moins riche que lors de la précédente projection. Tous se sont accordés sur le talent artistique de Marjane Satrapi et ont remarqué le caractère incomparable des deux films présentés. Le débat a à nouveau porté sur le caractère anti-iranien ou anti-islamique de ce film, sans qu’un accord puisse être trouvé. Le public a posé de nombreuses questions et fait des commentaires. Les filles intervenaient davantage que les garçons, indépendamment de leur style vestimentaire (tchador ou non). Certaines questions étaient applaudies par la salle, qui manifestait pour d’autres son désintérêt ou sa désapprobation.
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article